EN QUOI ÊTRE FACE AUX ŒUVRES EST UN APPORT BÉNÉFIQUE SUPPLÉMENTAIRE ?
La réalité d’une œuvre d’art est de faire l’expérience de sa matérialité et des effets sensibles qu’elle produit.
Devant une œuvre vous bénéficiez de cet apport. Ainsi vous allez directement la percevoir. Elle est constituée de matières, de gestes, de couleurs et de ses nuances et devient pour vous un véritable miroir.
Les bienfaits de la matière
Les nuances de la matière sont multiples qu’elles soient sur un support en 2 dimensions avec ses effets de transparences, d’épaisseurs, de collages… Ou bien traitées en volume grâce à des assemblages, tressages, accumulations…
La Joconde est une peinture à l’huile sur panneau de bois, réalisée par Léonard de Vinci vers 1503-1506. Ce tableau de la Renaissance italienne s’intitule « Portrait de Mona Lisa », le nom du modèle qui y est représenté.
De cette œuvre émane une grande sérénité grâce à une technique appelée sfumato, que Léonard de Vinci maîtrisait parfaitement. Les lignes et les contours disparaissent et semblent se fondre les uns dans les autres grâce à une superposition de plusieurs couches de peinture. L’artiste a également superposé des glacis à la surface de sa peinture, pour pouvoir ombrer subtilement sa composition. Chaque couche translucide lui permettait de varier les clartés et les coloris.
Les bienfaits du geste
Les effets du geste et des instruments participent aux effets visuels. Ils sont obtenus par les outils utilisés comme les brosses, les pinceaux, chiffons, les couteaux et même des outils inventés. Une alchimie s’opère entre les instruments et la matière – touches, traces, textures, factures, coulures. Le geste par ses variations, ses retenues, son » lâcher-prise » transmet poésie, expression, émotion…Nous pouvons face à une œuvre ressentir l’amplitude ou la retenue des gestes.
L’Arbre aux corbeaux de Caspar David Friedrichil met en scène un arbre. Le tronc est construit sur une diagonale. Il résiste au vent, ses branches sont tortueuses. Nous ressentons la puissance des traits et des gestes, leurs énergies transmises du fait du cadrage serré. Nous pénétrons alors dans ce décor sans mise à distance. Ce qui va à l’encontre des principes classiques de composition du paysage.
Nous percevons peu à peu la dimension supérieure de ce paysage qui devient un lieu de contemplation métaphysique. Pour Friedrich, l’acte de peindre est le résultat d’une vision intérieure : « … Obéis absolument à ta voix intérieure ; car elle est le divin en nous et ne nous égare pas » ; « Ferme l’œil de ton corps afin de voir ton tableau d’abord par l’œil de l’esprit. »
Les bienfaits de la couleur
Devant une œuvre vous percevez la sensation colorée. Celle-ci est reliée à la qualité physique de la matière comme celle des pigments, des liants, de ses effets provoqués par la façon dont elle est posée sur la surface ( glacis, empâtement, aplat, coulure…), du support qu’elle recouvre mais aussi dépend du format, de la surface et de l’environnement ainsi que de sa teinte, ses nuances et sa lumière. Les sensations de la couleur sont multiples. Vous pouvez grâce à elle percevoir son, lumière, odeur et ressentir la palette de ses effets sur votre psychisme.
« Impression, soleil levant » de Monet est à l’origine du mouvement impressionniste.
En 1874, l’artiste le montre dans la première exposition de la Société anonyme coopérative des artistes, organisée dans les anciens ateliers de Nadar. Il intitule alors cette vue du Havre : « Impression ». Ici, peu à peu, notre regard se laisse absorber et imprégner par les vapeurs et les brumes d’une aube automnale qui enveloppent les barques de passeurs, à peine esquissées au premier plan, et le soleil diffus vif orangé. Il est le point central de la composition et se distingue par ses teintes chaudes et sa netteté, au milieu de l’atmosphère froide et brumeuse du port. De nombreuses études ont d’ailleurs été réalisées sur ce soleil rougeoyant. Nous ressentons alors aussi ce temps présent, ce moment où le peintre pose ses dernières touches pour évoquer l’effet de la lumière au soleil levant.
Les bienfaits du miroir de l’œuvre
Face à une œuvre nous déclenchons ce qui est nommé « empathie esthétique ».
Véritable miroir, elle stimule notre envie de connaissance mais aussi vient réveiller notre mémoire et nos émotions. Ces données sont valables tout autant face à une reproduction que face à une œuvre originale.
La collection de cadres conservée par le département des Peintures du Louvre est composée d’un fond d’anciens cadres historiques, désaffectés au fil des encadrements, auquel s’ajoutent des cadres vides acquis par le musée. Différents styles de cadre sont présentés : cadre de style Louis XV, style Régence, cadre « a cassetta », cadre des Pays- Bas, cadre britannique.
Dans le domaine de l’art pictural, le cadre est la limite de l’image. Il peut être à la fois matériel ou immatériel : le bord de l’image. Quand on change de cadre, la perception de l’image change et sans toile, le cadre nous renvoie au vide et au silence.
La notion de vide est intimement liée à la notion d’être. Le vide est l’absence de matière. … Mais peut-on parler du vide comme d’une entité en soi, ou uniquement comme d’une absence ?
Le cadre délimite ici le vide. Il nous offre une bordure pour contenir ce vertige en soi. Il est aussi une invitation à projeter nos pensées ou nos images mentales.
Nous regardons devant nous et nous rencontrons le «vide ». Cette » absence de choses » nous invite pourtant à fixer, mais à fixer rien de précis.
Ici que voyons-nous ?
Essayons dans une approche sensible de ressentir ce vide en soi pour laisser peut-être laisser émerger notre propre silence intérieur.
